Le changement de vie est devenu, depuis une bonne dizaine d’années, une tendance qui fait vendre. Comme si chacune se devait de tout plaquer, recommencer à zéro pour être dans le coup. Honte à celle qui n’a pas envie de changer quoi que ce soit, ravie de tout ce qu’elle a construit. La bonne nouvelle c’est que fort heureusement, « changer de vie » n’est pas une obligation pour être heureuse. Pas besoin de lâcher votre job, votre mari, votre maison et partir à l’autre bout du monde pour avoir l’impression d’exister !
D’où vient cette mode du changement de vie ?
Changer de vie n’est pas nouveau. Auparavant on changeait de vie en quittant sa province natale pour se marier ou chercher du travail, à la ville le plus souvent, ou dans une autre ferme familiale. On parlait alors d’exode rural. La notion de quête de sens, développement personnel et bonheur était très éloigné du quotidien des citoyens. L’objectif était alors d’avoir un toit, à manger, fonder une famille et respecter les traditions. Peu s’aventurait hors des sentiers battus et du déterminisme familial. Après la guerre de 39/45, les gens cherchaient d’ailleurs plutôt une stabilité après ces années de chaos. Jusqu’aux années 70/80 qui ont sonné la fin du plein-emploi.
La montée de l’individualisme
L’individu a alors pris le pas sur la famille, la communauté et la société. Chacun va avoir plusieurs emplois, conjoints, résidences au cours de sa vie. Au nom de la recherche du bonheur personnel tout d’abord – pourquoi rester dans une vie qui ne me plait plus, alors qu’aujourd’hui tout est possible – et à la discontinuité de la vie devenue longue, plus longue que celle de nos parents et grands-parents qui créaient leur vie une bonne fois pour toutes à 25 ans au plus tard. Être soi à tout prix, abandonner ce qui ne nous convient plus, sans – parfois - chercher à réparer, évoluer ou aménager ce qui pourrait peut-être être sauvé, tout lâcher pour recommencer et se donner une seconde chance d’être heureux. C’est ce qui caractérise la société actuelle.
Le changement de vie devient une norme sociale
C’est souvent après les vacances d’été, dans ce si joli village, avec ce soleil et ce ciel bleu, cette qualité de vie, cette lenteur qui s’insinue dans son emploi du temps, que l’envie de tout envoyer balader surgit. Renforcée par tous ces témoignages de ceux qui l’ont fait, oubliant au passage de partager les galères de leur nouvelle vie bien évidemment… Comme si le changement était forcément la clé du bonheur durable. Changer de vie deviendrait presque une norme valorisée dans notre société où plus rien ne semble sûr, ni le CDI, ni le mariage… Où il faut faire une force de chaque échec, transformer, aller de l’avant et prouver qu’on peut changer nous aussi.
Changer de vie oui, mais en mettant toutes les chances de son côté
Mais, alors que dans les années 70/80 une poignée de baroudeurs lâchaient tout pour partir ailleurs, à l’étranger ou dans les Cévennes élever les lamas, aujourd’hui ce sont plutôt les classes sociales aisées et diplômés bac +5 qui sautent le pas. La plupart ont anticipé : bilan de compétences, formation, rupture conventionnelle avec indemnités et chômage, business plan bien ficelé. Rien n’est laissé au hasard. Le changement est une étape de la vie, pas une improvisation. Chacun ménage ses arrières, se fait guider et prend son temps pour créer une nouvelle vie qui lui ressemble. Avec toujours la possibilité de revenir à son métier ou sa région d’origine si cela ne se passe pas comme prévu.
Changer de vie au quotidien
Et pourtant, qui change vraiment de vie si ce n’est les témoins des magazines et autres conférences proposées dans les grandes villes ? Nombreuses sont celles qui changent leur vie petit à petit, chaque jour, avec de micro-victoires : manger plus sain, se (re)mettre au sport, trouver du temps pour soi, s’investir dans une association, ouvrir un blog… Toutes ces petites choses vont changer votre vie sans que vous ne vous en rendiez compte au début. Mais quand vous ferez le point lors de vos prochaines vacances d’été, vous pourrez voir le changement qui s’est opéré ! Le tout sans avoir tout envoyé valser... sans réfléchir !